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Le célèbre titre-restaurant, outil phare du déjeuner pour plus de cinq millions de salariés, pourrait changer de visage. Une proposition de loi déposée le 13 mai par le député écologiste Boris Tavernier veut dépoussiérer un marché de près de dix milliards d’euros. L’enjeu : simplifier l’usage des titres-restaurant, réduire les frais imposés aux restaurateurs et ouvrir la concurrence au bénéfice de tous. Voici ce qui se prépare en coulisses.
Titres-restaurant : un secteur verrouillé par quatre géants
Edenred, Sodexo, Natixis Intertitres et UP concentrent aujourd’hui 99 % du marché. Cette situation « source de dérives » a débouché en 2023 sur une amende record de 400 millions d’euros pour entente anticoncurrentielle. Pour Boris Tavernier et les rapporteurs du texte :
« Bien qu’en croissance, force est de constater qu’aujourd’hui le système dysfonctionne ».
Les commissions facturées aux restaurateurs grimpent jusqu’à 6 % de la valeur faciale, tandis que les salariés subissent toujours des plafonds et des restrictions horaires.
Une agence publique unique, sur le modèle des chèques-vacances
La pièce maîtresse de la réforme serait la création de l’Agence nationale pour le titre-restaurant (ANTR). Cet organisme public deviendrait l’unique émetteur et rembourserait directement les professionnels affiliés. Chaque commerce alimentaire signerait une convention obligatoire avec l’ANTR.
Et celle-ci pourrait « intégrer des critères de durabilité et de qualité ». Afin d’encourager une offre plus saine et locale. En supprimant les intermédiaires privés, le législateur espère faire baisser les frais et garantir un traitement identique sur tout le territoire.
Un usage plus souple pour les salariés
Fini les contraintes horaires : le texte entend autoriser l’utilisation des tickets-restaurant « où ils le souhaitent et quand ils le souhaitent ». La dérogation temporaire qui permet d’acheter tout produit alimentaire serait, elle, inscrite dans la loi et donc pérennisée.
Autre évolution : la cession entre collègues ou proches deviendrait légale, à condition de rester dans la limite quotidienne. Les salariés gagneraient ainsi en liberté sans rogner sur l’avantage fiscal.
Titres-restaurant : un calendrier qui laisse le temps d’adapter les outils
L’entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2027. Les opérateurs actuels disposent donc de dix-huit mois pour réviser leurs plateformes techniques, tandis que l’État aura le temps de déployer le futur système informatique de l’ANTR.
Cette date coïncide avec la fin du décret prolongeant l’usage élargi des titres-restaurant jusqu’au 31 décembre 2026… Un passage de relais en douceur pour les entreprises et les salariés.
Quelles conséquences pour votre pause déjeuner ?
Si la loi est adoptée en l’état, les bénéficiaires devraient profiter d’un pouvoir d’achat préservé et d’une grande souplesse d’emploi. Courses du soir, marché du week-end ou plat à emporter… Tout deviendrait possible. Pour les restaurateurs, la disparition des frais élevés pourrait redonner de l’air à des marges sous pression. Enfin, l’État espère mieux contrôler un dispositif devenu massif sans alourdir la facture pour les finances publiques.
Reste maintenant le parcours parlementaire : débats en commission, navette entre l’Assemblée et le Sénat, puis publication des décrets d’application. Mais une chose est sûre : l’emblématique titre-restaurant n’a pas fini de faire parler de lui. Et votre carte ou chéquier 2027 pourrait bien être estampillé ANTR.